HISTOIRE DE L’EAU – LE LAVOIR

L’eau à Charroux

C’est à la fin du VIIIème siècle, sous Charlemagne, que fut implanté le monastère à la confluence de l’étroite vallée du Merdançon, petit affluent de la Charente, et d’un val sec. La communauté religieuse grandissante y développa un réseau d’aménagements hydrauliques importants (étang, retenue d’eau, moulins, canalisation du ruisseau, …) permettant, au monastère d’assurer son fonctionnement, et aux populations attirées par l’importance du culte de ses reliques christiques, de s’installer en sa périphérie. Un premier bourg s’y développa sous la dépendance de l’abbé, «Bourg l’Abbé», puis, après la création du Comté de la Marche par le marquis Boson dans la seconde moitié du IXème siècle, un second bourg apparu, «Bourg le Comte». En aval de l’enclos monastique, autour du Merdançon traversant à ciel ouvert «Bourg le Comte», s’étaient installées notamment les activités des tanneurs.

A la fin du XIIIème siècle, une enceinte englobait les deux versants de la vallée et le Merdançon. La partie du Merdançon en amont de l’abbaye, dépendant de l’abbé, exploitait les eaux «claires» du cours d’eau pour les usages liés à l’alimentation (pêcherie, moulins, …) et au fonctionnement interne de l’enclos monastique; A l’intérieur de la ceinture fortifiée, nombre de fontaines, puits et citernes enterrées permettaient à la cité d’avoir une autonomie en cas de siège. Certains de ces aménagements existent encore dans les espaces publics ou bien dans les jardins et terrains de particuliers. Au 19ème siècle, le coeur de la cité conservait encore trois fontaines principales, place Saint-Pierre et place du Parvis. Seule subsiste , au pied de la Tour dite de « Charlemagne », la fontaine Saint-Sauveur du sculpteur Pierre-Amédée Brouillet, édifiée en 1849, quelques années avant la découverte en 1856 des reliquaires dans l’abbaye.

Le lavoir et l’arrivée de l‘eau courante

Ce n’est qu’en 1950, que fut installée l’eau courante à Charroux. Ce progrès allait modifier la vie des Charlois, la rendant plus aisée, surtout pour les femmes, qui avaient notamment la lourde tâche de l’entretien du linge corporel et domestique. Ainsi, les lavoirs, qui avaient rythmé la vie quotidienne des villes et villages, allaient progressivement voir leur usage s’amenuiser, et pour nombre d’entre-eux, être démolis.

Du fait de son implantation à l’extérieur de notre cité, Charroux a conservé le sien. Etabli le long du Merdançon, séparé de celui-ci par un canal alimenté par les eaux «claires» de la fontaine de « la Seppe », le lavoir, dont la création fut débattue par le conseil municipal en 1852, n’allait voir sa réalisation décidée qu’en 1867.
– «le lavoir serait établi sur le côté du ruisseau opposé à la route impériale sur une longueur de trente mètres.
-les tuiles courbes seraient employées pour la couverture.
-les lattes prévues seraient supprimées et remplacées par des chevrons battants en peuplier sciés à la dimension de 10 cm sur chaque face et placés à 10 cm les uns des autres.
-ces chevrons battants seraient pris dans des peupliers appartenant à la commune.»

Rythmé par huit travées reposant sur des poteaux de chêne, le bâtiment s’étire sur près de 30 mètres, permettant à de nombreuses charloises d’y accomplir de manière moins pénible, et avec une eau propre, ces tâches difficiles et usantes. Afin d’y plier le linge humide pour le transporter, une grande table de pierre fut installée. Son plateau, vraisemblablement un fragment de dalle funéraire (plate tombe) provenant de l’église abbatiale, repose sur des assises en pierre dont l’une d’entre-elles est moulurée.

Interrogeant les générations actuelles, ce patrimoine vernaculaire a su conserver son apparence, témoin symbolique d’une époque révolue, celle des générations disparues aux vies laborieuses. En ce sens, la commune de Charroux, «Site Patrimonial Remarquable», labellisée «Petite Cité de Caractère», a mené, en 2023, une opération de réfection de la couverture afin d’assurer la sauvegarde de ce bien patrimonial. Cette opération de préservation du bâti a été encouragée et aidée par la fondation «Sorégies».

 

Recherches, iconographie, conception et réalisation ©Laurent Soulet 2023 pour la commune de Charroux.