Il y a 80 ans, les troupes ennemies allemandes envahissent Charroux

 Document inédit 

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Soldats allemands posant à bicyclette quartier de la Grille, route de Limoges, date indéterminée – ©collection particulière

« C’est le 24 juin 1940 vers 15 heures, que les troupes allemandes sont entrées à Charroux par la route venant de Poitiers. Dès le 20 juin, des troupes françaises fuyaient devant l’ennemi et s’arrêtaient en ville pour se rafraîchir.

Le plus souvent, ces troupes étaient en débandade, privées d’officiers, sans arme, et s’en allaient vers le sud, sans autre but que le désir de ne pas se battre. Drôle d’armée!!

Les Allemands, d’après la rumeur publique, devaient être à Charroux dans la matinée du 24 juin. Vers 11 heures, une petite troupe motorisée française, bien décidée à retarder l’avance de l’ennemi, vient s’établir sur la place Saint-Pierre, près des halles. Des petits canons furent mis en batterie, rue de Rochemeaux, à la sortie de la ville, et au détour de la route de Poitiers, maison Aillaud*.

CHARROUX 4 RUE DU CHATEAU ANCIENNE MAISON AILLAUD 1

Ce n’est, que sur ma demande, que ces canons furent enlevés, car je craignais des représailles à l’arrivée des Allemands.

C’est alors, qu’une moto avec side-car et mitrailleuse alla s’embusquer près de l’allée du château de Rochemeaux*, et attendit l’arrivée de l’ennemi. Ce ne fut pas long. Avant midi, la moto retournait avec 2 soldats allemands blessés qui furent placés dans la salle du café Demay*. Je fis appeler Mr le docteur Babaud* qui ordonna leur transport à l’hôpital de Confolens. M. Meunier Henri*, voulait bien se charger de ce transport avec sa camionnette. La section de motorisés français avait bien travaillé à Rochemeaux. Deux officiers avaient été tués, et un autre décédait pendant son transport à Civray.

Charroux était calme, mais sur la place Saint-Pierre, des soldats français se promenaient, et n’avaient pas l’air de s’en faire. Les Allemands arrivent par la rue de la Gare. Les soldats français leur demandent des cigarettes qu’ils semblent fumer avec un immense plaisir. Et le défilé des Allemands continue pendant des heures, les camions, les canons, les motos se suivent en bon ordre et prennent la route de Champagne (Champagne-Mouton) par Asnois.

A cinq heures (de l’après-midi), je suis appelé à Rochemeaux par un commandant allemand. Je me rends aussitôt à cet appel, qui n’avait pourtant rien de réjouissant, et je trouvais sur le lieu de l’attaque, le commandant allemand et Mlle Vergel, réfugiée mosellane de Merlebach. Des autos étaient renversées dans les fossés, les pare-brises percés par les balles, le commandant, toujours le révolver à la main, me dit que cette attaque avait été préparée par des francs-tireurs de la ville, et qu’il allait faire bombarder la ville. je lui expliquais, par le truchement de Mlle Vergel, que des soldats motorisés français étaient venus les attendre là, qu’ils avaient amenés 2 prisonniers allemands blessés à Charroux, que j’avais fait appeler le docteur, et que je les avais fait conduire à l’hôpital de Confolens. Le commandant se radoucit, et je retournais à Charroux.

L’occupation qui devait durer 4 ans était commencée.

Les soldats allemands place Saint-Pierre devant l’ancien Hôtel de la Croix Blanche, date indéterminée- ©collection particulière

Environ 800 soldats restèrent à Charroux. Je pris tout de suite contact avec l’officier qui les commandait, et m’offris pour l’aider dans le logement de sa troupe. Il me répondit (en français avec un fort accent tudesque « Pas besoin de vous, M. le bourgmestre, nous ferons seuls. »). Et en effet, grâce à certains réfugiés mosellans, toute la troupe était logée le soir même. Les soldats français, encore à Charroux et dans les environs, étaient parqués dans le champ de foire*, le pré de Mme Veuve Bottey*, et jusque dans l’église*. Ils étaient mal gardés, et un grand nombre d’entre eux réussit à s’échapper et à rejoindre la zone libre*.

CHARROUX (86) - LOCALISATION CAMPS PRISONNIERS FRANCAIS JUIN 1940CHARROUX (86)- LOCALISATION CAMPS PRISONNIERS FRANCAIS JUIN 1940Dès le soir, je fus avisé que j’avais à pourvoir à la nourriture des 7500 prisonniers qui restaient. Je l’ai fait en faisant appel à M. Tribert François pour la viande et aux boulangers de Charroux, Chapelle-Bâton et Savigné pour le pain. Les chevaux étaient parqués dans le champ de M. Debect, au-dessus du champ de foire. Mal gardés et privés de nourriture, ils ne tardèrent pas à crever les buissons entourant le champ et à causer de graves dommages aux cultures environnantes. Certains crevèrent de faim et de soif, et je dus les faire enfouir. Pour régler cette question de chevaux, j’allai à Rochemeaux (au château) où était le commandant d’armes, et lui expliquai qu’à Loches, puis Asnois, il y avait des parcs bien clos, où les chevaux auraient à manger et à boire. Nous y allâmes aussitôt en auto, et après visite des lieux, il fut convenu que tous les chevaux seraient amenés là par les soldats allemands. Vaine promesse. Rien ne fut fait, et je fis appel à François Tribert pour qu’il les reçoive dans le pré du petit Pot, où il avait lui-même 6 chevaux en pacage. Ce qui fut fait aussitôt.

Camps de prisonniers de Charroux dans la Vienne, du 24 juin au 2 juillet 1940« Camps de prisonniers de Charroux dans la Vienne, du 24 juin au 2 juillet 1940 » – cliché Louis Glémin –   photo prise vraisemblablement du pré appartenant à  la Veuve Bottey (au fond, les coteaux du Châtelet et de Montplaisir).

Charroux était très bien peuplé en ce moment, en plus de la population, il y avait 3000 réfugiés (mosellans, du Nord, de Paris, etc…), 7500 prisonniers, et environ 800 soldats allemands.

Les réquisitions commencèrent dès le 25 juin au matin, par des tables empruntées aux habitants et 42 chaises que je pris à l’église, les meilleures. De plus, les occupants prenaient dans les maisons où ils étaient hébergés, le matériel qui leur convenait, et le transportaient n’importe où. J’ai retrouvé à Bel-Air après leur départ, des fauteuils, des lits, des commodes qui ont été remis à leurs propriétaires. 

Soldats allemands occupation 1940 (photo d'illustration non localisée)

Soldats allemands occupation 1940 (photo d’illustration non localisée)

Et cela dura jusqu’au 16 septembre 1940, jusqu’au départ des réfugiés lorrains pour la Moselle.

Aussitôt le départ, les Allemands s’installèrent dans les locaux restés vides et usèrent et abusèrent du mobilier, personne n’étant là pour empêcher leur acte de vandalisme.

La salle des fêtes où avait lieu le cinéma, occupée dès leur arrivée, fut mise dans un triste état. Puis après le 16 sept 40, ils occupèrent le foyer de la jeunesse, emportant je ne sais où, 12 lits de fer à une place, 12 matelas, toutes les couvertures.

La cuisinière alla rejoindre la ligne de démarcation de la Petite Motte et fut à nouveau prise par le maquis et finit dans les bois. Les belles tables avec toile cirée toute neuve, les chaises, la vaisselle, disparurent morceau par morceau. La cour du foyer de la jeunesse servait de dépotoir pour les détritus de la cuisine. La cheminée ne leur plaisait pas pour faire la cuisine, parce qu’insuffisante et mal commode, ils installèrent en maçonnerie trois fourneaux à cochons à la place du mur de la salle à manger jusqu’à l’évier.

Carte postale  représentant l’ancienne demeure de la famille Fontaneau-Debect où s’est établi le Nouvel Hôtel des Halles dans les années 50

La maison Debect fut entièrement dévalisée de toutes les richesses qu’elle contenait.

Charroux (86)-Place.St-Pierre 1 – ancienne propriété Testard-Bourdier réquisitionnée par l’occupant allemand qui y avait établi la Kommandantur.

La maison Testard fut en partie déménagée, le mobilier brisé entassé dans une chambre près de l’escalier, et j’ai vu les débris de table, d’armoires, de matelas, de couette, la tunique de feu M.Testard* bien étendue pour montrer les galons.

La maison Mairat, au 15, rue de Rochemeau, eut un peu moins à souffrir, parce qu’elle était à peu près vide de mobilier.

Charroux (86) - PLACE Saint-Pierre - Ancien hôtel de la Croix banche (Bonnin)Dans les hôtels Bonnin et veuve Bonneau, chez M. Vriet, où ils logèrent les chevaux, les crèches, les râteliers, les bat-flancs, leur servirent de bois de chauffage.

Charroux (86) - Rue de Rochemeaux - hôtel restaurant Bonnaud

A Bel-Air, la cave fut visitée et les vieilles bouteilles d’alcool et de bon vin de M. Duquerroy furent vidées.

 

A l’hospice des vieillards, tout le premier étage fut affecté aux Allemands, les vieillards, sur leur ordre, avaient été placés au rez-de-chaussée. A leur départ, des lits en fer, des sommiers, des matelas de laine, des traversins, une soixantaine de draps avaient disparu. Les armoires avaient été fracturées, vidées du linge qu’elles contenaient, et leurs étagères brûlées.

En 1942, il prit fantaisie au commandant des douaniers* de faire prendre des bains à ses subordonnés, et je reçus l’ordre de faire mettre en bon état la salle de bains de l’hospice. Comme je ne mettais pas assez d’empressement pour cette exécution, le commandant, fort en colère, voulait me fusiller.

Les Halles servirent de remise aux camions et voitures de l’occupant gardés jour et nuit par des sentinelles.

Cour de l’école communale (côté garçons), située derrière la mairie (fin des années 50/début des années 60),  au fond, le préau- ©collection particulière

Dès leur arrivée, le 24 juin au soir, les Allemands occupaient les locaux scolaires à plusieurs reprises, soit pour faire des théories, soit pour le couchage. Des classes furent débarrassées de tout le matériel scolaire que les Allemands entassèrent pêle-mêle sous les préaux. Résultat, une vingtaine de tables d’écolier mises hors d’usage et qu’il nous a fallu remplacer aussitôt. La bibliothèque scolaire qui renfermait un nombre respectable de volumes très intéressants fut pillée. Des carabines de tir de la Société Sportive « l’Avant-Garde » disparurent. Je ne compte pas les carreaux brisés, les poêles gravement endommagés, les cartes maculées, etc…

Charroux (86) – à gauche de l’église, l’école maternelle publique (l’asile Sainte-Marie), construite en 1876, grâce au don de Mme Marie-Estelle Bourdier, Veuve Lédier.

A l’école maternelle, qui servit de prison pour les officiers français du 24 juin au 8 juillet, un poste de T.S.F. disparut avec divers autres objets.

CHARROUX (86) - MAIRIE ET JUSTICE DE PAIX

Charroux (86) – Mairie et justice de paix – De part et d’autre, les logements des instituteurs et les portes d’accès différenciés (filles et garçons) à l’école publique .

Notre place de la Mairie, herbue, si propre habituellement, fut transformée en véritable bourbier durant l’hiver 1940-41, par les passages répétés et la station des camions allemands.

Contrôle des laissez-passer et planton devant la perception, route de châtain, date indéterminée- ©collection particulière

Non contents de s’en prendre aux biens, ils s’en prirent aussi aux personnes. Le 11 sept. 41, M. Chardac*, premier adjoint au Maire, était arrêté par la Gestapo, et emmené à la Pierre Levée. Le lendemain, Me. Châtain*, notaire, était également arrêté. Tous les deux firent 5 semaines de cellule; la raison: Affaire Renard, paraît-il! »

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note de l’auteur: (écrit dans la marge: « ailleurs après ») → « L’Allemand est toujours la même brute, le vandale des temps anciens, que notre région, n’avait pas connu depuis l’automne 462. »

Lazare Bernard

 

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Cette note manuscrite inédite de Lazare Bernard, maire de Charroux de 1935 à 1945, est non datée; sa rédaction ne fut vraisemblablement pas terminée, car elle relate des évènements n’allant pas au-delà de l’année 1942. Le drame du 4 août 1944, où 5 otages civils raflés à Charroux furent fusillés au Vigeant (Vienne), n’y est pas mentionné.

Saluons la lucidité, la clairvoyance et l’intelligence de Lazare Bernard, maire, qui, en faisant retirer la poignée de petits canons placés dans Charroux par une petite troupe de l’armée française en pleine déroute, et en faisant soigner et transférer à l’hôpital les blessés allemands,  sauva, sans nul doute, Charroux d’une destruction par bombardement, lors de l’arrivée des troupes allemandes en juin 1940.

Lazare Bernard posant fièrement à côté du chapiteau monumental provenant de l’ancienne église abbatiale – photo François Eygun (années 40?)                                        Inventaire Poitou-Charentes – fonds François Eygun

L’auteur: Enfant du pays, né à Charroux en 1874, instituteur à l’école publique, érudit local, maire de 1935 à 1945, Lazare Bernard était passionné par l’histoire de Charroux. Il s’opposa à la démolition du porche de l’ancien hospice Saint-Jean Saint-Blaise, route de Poitiers, et ne put lutter contre la décision de le détruire prise par son conseil municipal en 1938. Il tenta d’en sauver les vestiges en les faisant démonter afin qu’il puisse être reconstruit par la suite. Il n’en reste aucune trace. Seuls, les notes prises et les croquis qu’il fit lors de sa démolition subsistent. Il habitait au n°1, rue de la Batterie. Il décéda en 1952, et repose au cimetière de Charroux (allée O, sépulture 37).

CHARROUX (VIENNE) CIMETIERE SEPULTURE LAZARE BERNARD MAIRE 1 - ©Laurent Soulet 

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Annotations texte:

Maison Aillaud*: située sur la ceinture extérieure des anciens murs de la  cité médiévale, bordant l’actuelle route de Poitiers, la maison fut habitée à cette époque par la famille Aillaud dont l’épouse tenait un petit café/bistrot.

Château de Rochemeaux*

Café Demay*/: Le café était tenu par Louise Demay, qui succéda à son père, Alfred. Situé au pied de la Tour, et face aux Halles, (1, rue de Rochemeaux), le café a été témoin des événements charlois pendant plusieurs décennies; son activité a perduré jusqu’à  nos jours.

Docteur Babaud*: le docteur Georges Babaud s’installa à Charroux au début des années 1910. Mobilisé lors de la Grande Guerre, il fut décoré de la Croix de Guerre pour ses actes de bravoure au front. Il exerça son activité à Charroux, place de la Cahue, et y demeura jusqu’à ses derniers jours. Il repose au cimetière de Charroux (allée 1L52).

M. Meunier Henri*

Champ de foire*

l’église*: l’église paroissiale Saint-Sulpice eut à subir des dégâts. Le procès-verbal d’une séance de conseil municipal de l’année 1959 mentionne l’état des vitraux dont certains « avaient été brisés par l’occupant; un dossier pour dommage de guerre ayant été déposé… »

Pré de Mme Veuve Bottey*

« réussit à s’échapper et à rejoindre la zone libre« : Marie-Claire Johanet (née Pasquier) se souvient que de nombreux soldats français prisonniers avaient été retenus rue Saint-Sulpice et que l’un d’entre-eux avait réussi à s’échapper par les jardins en terrasse situés à l’arrière de leur propriété familiale, après que ses parents lui eurent remis des vêtements civils.

M. Tribert François*

Boulangers*

Champ de M. Debect*

Bel-Air*

La Petite Motte*

*Maison Testard, située place Saint-Pierre, à côté des Halles. Cette monumentale demeure fut bâtie dans le courant du 19ème siècle à l’emplacement d’un important logis médiéval. C’était la propriété de l’une des plus anciennes familles de Charroux, les Bourdier, dont la présence est attestée dès la fin du 15ème siècle, dans le faubourg médiéval de Saint-Laurent. C’est par alliance de Denise Bourdier avec Abel Testard, en 1881, que la propriété passa dans la famille de ce dernier. Durant l’occupation, cette maison fut réquisitionnée, servit d’hébergement à certains officiers de l’armée nazie, puis devint le siège local de la Kommandantur.

*Abel Testard: commissaire de la Marine, Chevalier de la Légion d’Honneur, décédé en 1899, époux de Denise Bourdier. Il repose au cimetière de Charroux dans le carré familial Bourdier/Testard (allée P, sépulture 16).

*Maison Mairat, sise au 15, rue de Rochemeau, fut réquisitionnée et servit d’hébergement à des officiers allemands (cf. Marie-Andrée Boileau-Bégoin).

L’ensemble des maisons non-occupées furent réquisitionnées et servirent d’hébergement aux soldats allemands. Le château de  Rochemeau fut réservé au haut-commandement, les plus belles demeures, aux officiers et sous-officiers; au 7, rue Saint-Sulpice, la maison Chevrier, inoccupée, le fut, alors qu’en face,  la propriété Pasquier, habitée par l’ensemble de la famille ayant quitté Paris, échappa à la réquisition (cf Marie-Claire Pasquier-Johanet). Le commun des troupes ennemies fut aussi logé chez l’habitant,  occupant notamment les chambres vacantes des maisons charloises, Marie-Louise Guérin-Clément, se souvient avoir dû laisser sa chambre à un sous-officier allemand qui avait pris pension chez sa mère tenant le café du 12 rue de la Gare.

L’hospice des vieillards*

les douaniers*: Les postes de contrôle situés sur la ligne de démarcation entre la zone occupée et la zone libre furent tout d’abord surveillés par les soldats de la Wehrmacht. Ce n’est qu’en octobre 1941, que les douaniers venant des ports de l’Atlantique les remplacèrent.

LIGNE DE DEMARCATION FRANCE 1940 (photo d’illustration non localisée)

Ligne de démarcation France 1940 (photo d’illustration non localisée)

LIGNE DE DEMARCATION FRANCE

CARTE VIENNE LIGNE DE DEMARCATION JUIN 1940

Carte Vienne ligne de démarcation juin 1940 – source: ONA – CCHA

M. Chardac*

Me. Châtain*

Voir les souvenirs rapportés de ces évènements ici

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Les principales vagues de réfugiés dans la Vienne : quelques jalons

Septembre 1939-août 1940 : évacuation des Mosellans

C’est bien avant la guerre que l’hypothèse de déplacements de population avait été envisagée: en marge de l’aménagement de la ligne Maginot, entre 1929 et 1936, le gouvernement met sur pied des plans d’évacuation des populations les plus exposées en cas de déclenchement d’un conflit, en premier lieu pour les communes situées entre la ligne Maginot et la frontière allemande.

Ces plans sont mis en œuvre dès septembre 1939 : de nombreux habitants d’Alsace et de Moselle, par communes entières, sont ainsi évacués vers des départements de repli désignés à l’avance. Ainsi, la Vienne accueille pour sa part 62000 réfugiés mosellans. Schématiquement, les habitants d’une commune donnée de Moselle sont installés dans une commune de la Vienne. Certaines communes mosellanes importantes ont pu évidemment se trouver réparties sur plusieurs communes de la Vienne.

Après l’armistice de juin 1940, leur retour vers la Moselle est organisé à partir du mois d’août 1940. Néanmoins, ils sont assez nombreux à être restés dans la Vienne jusqu’à la fin de la guerre, soit volontairement, soit parce que les autorités d’occupation leur ont interdit le retour dans une Moselle alors placée sous administration allemande et où Juifs et Polonais, notamment, étaient désormais indésirables.

Des réfugiés d’autres provenance ont aussi été accueillis dans la Vienne dès 1939, mais les Mosellans représentaient alors clairement l’écrasante majorité : plus de 4 dossiers sur 5, pour la période antérieure à l’armistice de juin 1940, concernent des familles mosellanes. Pour donner une idée de l’ampleur du phénomène, on constatera simplement que le nombre total de dossiers de réfugiés mosellans pour cette première période est légèrement supérieur à l’ensemble des dossiers de réfugiés, toutes provenances confondues, pendant l’Occupation.

Les informations ci-dessus proviennent pour l’essentiel de « Un exil intérieur. L’évacuation des Mosellans, septembre 1939-octobre 1940 », Libel, 2009 – source: archives départementales de la Vienne

 

Recherches, documentation, commentaire et mise en page: ©Laurent Soulet – 2020

 

 

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